L’artiste pakistanais Imran Qureshi, maître des miniatures, s’attaque comme de nombreux artistes avant lui au gigantisme de la Curve du Barbican et de ses 90 mètres d’espace avec sa première exposition au Royaume-Uni: « Where The shadows are so deep. »
Il plonge l’espace dans la pénombre, offrant une atmosphère intimiste aux lieux et un écrin à ses œuvres. Elles jaillissent en gemmes de lumière, grâce à l’utilisation abondante de feuilles d’or. L’entrée de la Curve, encore éclairée, expose des oeuvres représentant une nature domptée. En s’engouffrant d’avantage dans l’espace, on se confond dans l’absence de lumière et on se confronte à des scènes de plus en plus inquiétantes. La scénographie y est pour beaucoup, avec un jeu sur le niveau de positionnement des miniatures qui force le regard à se balader le long des murs. On aperçoit alors de larges tâches qui en dégoulinent, touchant les œuvres au passage, et qui viennent atterrir en flaques sur le sol. Jeux de trompe-l’œil, ces apparentes scènes de crime sont à bien y regarder des motifs floraux, reflétant ceux présents dans les miniatures.
L’artiste explique : « dans les installations sur des sites particuliers, j’ai toujours essayé de créer un dialogue entre l’architecture du lieu et mon œuvre. Depuis 2001, je peins directement sur les murs et les sols des lieux où j’expose. Lorsque j’ai visité la Curve, j’ai été émerveillé par la grandeur et le mouvement de l’espace. J’ai voulu faire quelque chose avec cet espace qui soit complètement inattendu, simple mais fort. Les miniatures sont au cœur de mon art, elle façonne ma pensée et ma sensibilité. Dans la tradition des miniatures de Mughal, le motif de la courbe a toujours été un élément important dans la représentation formelle du paysage. »
Il y a une opposition entre le côté très travaillé de la miniature, véritable travail d’orfèvre dans sa précision, et la désinvolture des tâches et des lignes qui barrent l’œuvre. Comme si la nature sereine pouvait s’ébranler à tout moment et revenir à l’état sauvage.Vous pourriez bien le découvrir au détour d’une courbe.
Barbican, The Curve, jusqu’au 10 juillet